samedi 2 juin 2007

Sensuels feuillages

Dans un commentaire publié hier 31 mai, Saint Médard a écrit : "derrière chaque pétasite se cache un continent".

Phrase suggestive et profonde, qui nous rappelle que derrière, ou sous, le jardin réel, se cache le jardin des rêves... Elle a fait penser Germinal à un poème du 17ème siècle où il est également question de géographie...



Madame, allons! mes forces au repos se refusent;
Je suis dans le besoin tant que je ne besogne.
Un ennemi ayant son ennemi en vue
Sans combattre s'épuise à demeurer debout.
Ôtez cette ceinture, brillant comme Orion :
elle encercle un monde bien plus beau. Dégrafez
Ce scintillant plastron qui défend votre gorge,
Arrêtant les regards des butors indiscrets.
Délacez-vous : ce carillon harmonieux,
Qui vient de vous, annonce l'heure du coucher.
Ôtez cet heureux busc, objet de mon envie,
De vous toujours si proche et toujours si tendu.
Votre robe en glissant offre un paysage beau
Comme les pré fleuris d'où l'ombre se retire.
Ôtez ce bandeau de métal et découvrez
De votre chevelure vivante le diadème.
Enlevez maintenant ces souliers et entrez
Sans crainte dans ce temple à l'amour consacré,
Ce lit moelleux : en robe blanche ainsi les anges
Nous visitaient jadis - et toi, ange, tu m'ouvres
Un ciel semblable au paradis de Mahomet.
Des esprits malins vont vêtus de blanc : ces anges
Des spectres en ceci se distinguent : les uns font
Se dresser nos cheveux, les autres notre chair.

D'errer donne à mes mains licence ; laisse-les
Passer dessus, dessous, devant, derrière et entre.
Ô toi mon Amérique, terre neuve pour moi !
Royaume plus sûrement gardé par un seul homme,
Ma mine de pierres précieuses, mon empire,
Que je suis bienheureux d'ainsi te découvrir !
Se soumettre à ces liens c'est être en liberté :
Où se pose ma main j'appose mon sceau.


Entière nudité, toutes joies te sont dues !
L'âme quitte son corps, le corps ses vêtements
Pour goûter des joies pleines. Les gemmes dont les femmes
Se parent, ce ne sont que pommes d'Atalante
Jetées aux yeux des sots pour que leurs bas désirs
Se portent non sur elles mais sur ce qui est leur.
Image ou riche reliure de livres faits
Pour les profanes, telle est femme ainsi parée;
Mais la femme est en soi notre livre mystique
Qui ne s'ouvre qu'à ceux que sa grâce imputée
Rend digne de le lire. et puisque c'est mon droit,
Tout aussi librement qu'à quelque sage-femme,
Montre-toi; rejette, oui, ce lin blanc :
Point d'innocence ici et point de pénitence.

Pour te donner l'exemple, je suis nu le premier;
Eh quoi ! Pour te couvrir te faut-il plus qu'un homme ?

John Donne, Elegy 20 :
"On his Mistress Going to Bed", 1633.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Bravo pour le HA KA! Comment comptez-vous arrêter un jour la marche inexorable de vos petasites?

Germinal a dit…

Le petasite est inexorable, mais grande est la prairie...

N.B. : les photos du jour représentent le "chlorophylien Trachystemon".

Anonyme a dit…

Ah que c'est beau.... les poèmes dédiés aux femmes ou aux fleurs sont bien les plus exaltants...Je suis sûre qu'il vous en reste suffisamment, Cher Germinal, pour tenir jusqu'à la millionième.

Anonyme a dit…

Hummmmm... en effet.... ça fait rêver ! ! !.....